Alain Prost estime qu’il est « sous-estimé » en parlant de la réalisation de sa carrière de pilote. Pourtant avec 4 titres de champion du monde, 51 victoires et ayant eu 60% de coéquipier champion du monde (ou qui allait l’être). Le palmarès est loin d’être sous-estimable. Pourtant on parle de perception et c’est l’après carrière pilote qui compte, pour entretenir la légende.

Qui se souvient de Nelson Piquet ? a part sa fille Kelly qui est la fiancé de Max Verstappen et son fils Nelson Piquet Jr qui a été pilote Renault F1 entre 2008 et 2009. Qui a un souvenir du triple champion du monde brésilien ? simplement parce que le Carioca a quitté le monde de la course il y a 30 ans, pour se consacrer à une entreprise de gestion de poids lourds. Idem pour Jody Scheckter qui après sa saison 1980 avec Ferrari a préféré retourner dans sa ferme en Afrique du Sud. D’autres champions du monde ont eu un destin similaire.

Rosberg, Stewart et Lauda, les exceptions

Keke Rosberg après sa carrière de pilote, a décidé de créer une équipe de DTM et une agence de management pilote (il a promotionné la carrière de JJ Letho et Mika Hakkinen), avant d’être le conseillé de son fils Nico Rosberg. En cela, Rosberg est aussi une exception, car la légende c’est entretenu via le nom sous forme de dynastie. Comme les Hill et Andretti, par exemple.

Jackie Stewart a été le premier influenceur de l’histoire de la F1, devenu pendant 10 ans un support publicitaire pour les marques (Rolex, Ford, ELF surtout), avant de devenir consultant de luxe dans les années 90 et lancé son écurie en 1997, avant de la revendre en 2000 à Ford. Depuis lors, Stewart fait un mix entre consulting et publicité pour faire fructifier son image de triple champion du monde d’une époque qui relève de la préhistoire aujourd’hui. Mais qui fascine la nouvelle génération.

Puis il y a des exceptions. Avec une nuance toutefois. Niki Lauda a très tôt assumé sa reconversion à la fin des années 70 en créant la compagnie aérienne Lauda Air. Mais au début des années 80, un grave accident d’un de ses Boeing a contraint le pilote à revenir dans la discipline. Puis après la retraite de 1985 ? Il a développé sa compagnie avant de la revendre. Puis il a été appelé comme consultant chez Ferrari entre 1992 et 1994 (pas un succès), puis patron de Jaguar F1 (un gros échec), puis ? 10 ans de consulting TV avec la chaine allemande RTL, avant de revenir comme actionnaire de Mercedes AMG F1 en 2013 et remporté les titres avant sa disparition.

Le cas Lauda est un cas à part, car il a disparu. Et une disparition trouble la perception que l’on a d’un pilote pour le transformer en légende. Ayrton Senna est une légende, James Hunt est une légende (merci Rush). Il est intéressant de constater que Nigel Mansell n’existe sur les réseaux sociaux, que à travers Ayrton Senna. Soit via la bataille à Monaco 1992, soit sur l’auto-stop de la saison 1991, soit via la course de Jerez de 1986. Autrement, Mansell n’existe pas vraiment dans l’imaginaire collectif. C’est la même chose pour Prost.

Lauda à l’ère de l’inactivité dans un monde ultra médiatique

Alain Prost a existé par le prime d’Ayrton Senna. C’est la médiatisation de l’époque qui a rendu légendaire l’affrontement en piste. La disparition du brésilien a été un choc il y a 30 ans. Prost a alors fait le choix de devenir consultant chez McLaren, avant de lancer son écurie de course en 1997 : Prost GP. Cela a été un échec. Qui a entaché longuement sa réputation et engagé une longue traversé du désert ou il redevenu pilote. Puis l’opportunité Renault F1 Team est revenu en 2016, mais encore une fois, cela n’a pas été un passage fructueux. Ainsi, avec le temps et les réseaux sociaux, c’est le duel Prost/Senna, Senna/Prost qui reste dans l’imaginaire et dévaloriser l’apport d’Alain Prost à la Formule 1. Malheureusement, il n’a pas de projet à annoncer. Donc la nostalgie l’emporte et l’image se réduit.

Pourtant son équipe a été la plus innovante en matière de marketing (on utilise encore ses principes aujourd’hui et son modèle économique), son approche de la course est devenu la norme (son surnom est le Professeur) et il a offert à la France son plus beau champion.

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